Célèbre pour son jeu spectaculaire au tennis, son charisme et son revers redoutable, Henri Leconte est au micro pour Le Déclic Magazine !
Qu’est-ce qui t’a donné le déclic de te lancer dans le monde du tennis professionnel ?
Le déclic ? C’est avant tout une histoire de passion et de famille qui a commencé dans le ventre de ma maman où j’entendais déjà des balles de tennis. Ensuite, dans mon couffin, je jouais avec des balles blanches, la couleur de l’époque et des raquettes en bois. Le Déclic s’est imposé naturellement pour en devenir une passion pour moi. Je dormais avec ma raquette et j’allais à l’école avec les balles. J’étais renvoyé de l’école parce que quand il pleuvait, j’obstruais les gouttières avec les balles qui avaient le diamètre parfait pour bloquer l’eau qui entrait ensuite dans les classes. Ça nous offrait un peu plus de temps de récréation. Puis, de fil en aiguille, ce sont ces petits moments, ces contacts, ce « Déclic » qui vous fait passer dans une autre dimension, qui m’ont fait basculer. C’est ce que j’explique aussi dans mon livre « Balles neuves » que j’ai sorti récemment.
La réaction de ta famille par rapport à ce choix ?
J’ai eu la chance d’avoir deux sœurs qui jouaient très bien au tennis. Elles étaient championnes de France Cadettes. Ma maman était professeure de tennis, donc cette passion était déjà dans nos gènes. Ce qui est important, c’est de bien transmettre le message et de ne pas faire comme on voit parfois aujourd’hui, où ce sont les parents qui décident pour les enfants. Ce sont des choix difficiles à prendre, et parfois les parents ont peut-être trop envie que leur fils ou leur fille réussisse, comme les faire rester à la maison pour étudier, ce qui peut les frustrer car ils n’ont pas pu suivre leur passion. C’est toujours très délicat, ce n’est pas simple.
Réussir, c’est fantastique, mais il y a aussi beaucoup de jeunes qui ne réussissent pas. Bien sûr, on ne devient pas champion sans souffrir. Pour moi, ce ne sont pas des sacrifices, mais des moments extraordinaires de ma vie. Tout le monde dit : « Vous vous rendez compte, vous n’avez pas vécu votre adolescence ». Il y a beaucoup d’adolescents qui aimeraient vivre ce que j’ai vécu à ce moment-là. Au contraire, c’est une passion, une détermination, une soif de vivre et de vaincre.
Quel est le match de ta carrière qui t’a le plus marqué ?
J’ai eu la chance de jouer de nombreux matchs, mais le plus intéressant à Roland-Garros a été celui contre Boris Becker en 1988. Je l’avais battu en Allemagne, et il m’a dit : « La semaine prochaine, je vais te battre à Roland-Garros ». Je lui ai répondu : « Très bien Boris, mais tu ne me battras jamais à Roland-Garros, jamais sur terre battue… peut-être sur gazon à Wimbledon, parce que c’est très rapide ». On se provoquait un peu ! Et je l’ai battu en huitièmes de finale à Roland-Garros en cinq sets.
En 1988, qu’est-ce qui t’a manqué pour battre Mats Wilander ?
C’était le meilleur joueur sur terre battue, le Rafael Nadal de l’époque. Ce que je n’ai pas su gérer, ce sont mes émotions. Je suis arrivé sur le terrain déjà fatigué et épuisé par une nuit agitée où je suis passé par tous mes états. J’avais aussi eu quelques matchs très difficiles en cinq sets. Les émotions, il faut apprendre à les gérer, à les dompter et à les surpasser ! Mais j’ai perdu contre le numéro un mondial, donc il n’y avait pas de honte. Mais c’était la façon…
Raconte nous un moment fort de la Coupe Davis 1991 ?
La Coupe Davis 1991 a été remplie de moments forts ! Trois mois avant, j’étais presque en chaise roulante. Si la demande de Yannick Noah ne m’avait pas fait comprendre certaines choses, je ne serais pas là aujourd’hui à avoir remporté la Coupe !
Ça a été un moment incroyable ! Ce moment était tellement important, tellement fort, qu’il a été ressenti dans toute la France et même dans le monde entier. C’était David contre Goliath, les américains contre les français, avec Guy Forget qui était parmi les dix meilleurs joueurs du monde à cette époque, venant de battre Pete Sampras. Et puis, il y avait un gars qui a mis le feu à la baraque, comme on disait, avec son épée en bois qui est devenue une arme fatale. Les américains pensaient vraiment gagner, et nous, nous sommes arrivés avec la passion, l’envie et la détermination, et nous avons gagné.
Quelle a été ta plus grande source d’inspiration ?
Les sources d’inspiration c’est Björn Borg, Ilie Năstase, et Ion Țiriac, qui lui, est toujours comme un deuxième père pour moi. L’inspiration, c’est aussi aller chercher encore plus loin ce que l’on veut, dépasser des limites qu’on n’aurait même pas imaginées. On essaie de prendre un peu de tout cela, de comprendre et de se demander pourquoi ils y arrivent et pas nous. Donc, l’inspiration est quotidienne. J’ai eu la chance de rencontrer énormément de personnes qui m’ont aussi aidé à mieux me comprendre et à être plus performant.
Quelles sont tes autres passions à part le tennis ?
Le golf est vraiment devenu une passion, c’est un plaisir ! Maintenant, je m’y investis davantage car il faut travailler le golf, c’est beaucoup plus complexe que le tennis, et je le maîtrise moins bien. Et j’ai toujours cette passion pour le sport automobile en moi ! J’ai un moteur dans le ventre, donc j’ai participé à quelques courses.
Quels genres de courses as-tu faites ?
J’ai participé au Trophée Andros, aux 24h de Chamonix, ainsi qu’à des courses en Porsche Super Cup dans les années 90. Actuellement, je participe à des courses historiques avec une TVR de 1964 et nous faisons les deux tours d’horloge. C’est un domaine toujours ancré dans l’histoire. Je connais bien Sébastien Loeb, qui pour moi est le plus grand pilote de tous les temps, après Ayrton Senna bien sûr, car il est mon idole ! Mais Sébastien démontre une détermination incroyable et une maîtrise de la vitesse et de l’aisance que l’on ne réalise pas toujours. Bien sûr, être pilote de Formule 1 est fantastique, mais en rallye, il faut s’adapter comme un joueur de tennis à la surface, aux conditions météorologiques…
Quels sont tes projets futurs ?
Chaque jour apporte de nouveaux projets. Pourquoi ne pas chercher et soutenir un joueur qui pourrait réellement remporter Roland-Garros ? Il est essentiel de se poser les bonnes questions, de chercher la bonne direction structurée avec de bonnes sensations et de bonnes valeurs ! Le tennis est une grande famille, et nous sommes là en tant que passionnés pour soutenir et encourager.
Quels seraient tes conseils pour de jeunes joueurs et joueuses de tennis ?
Écoutez bien, les enfants, une chose très importante : ne lâchez jamais prise. Ne vous dites jamais que c’est trop difficile. Bien sûr, cela peut être difficile parce qu’il y a beaucoup de monde, mais surtout, ne laissez personne, que ce soit vos parents ou quelqu’un d’autre, décider à votre place. Vous devez le faire pour vous-même ! Cela doit venir du fond de votre cœur et de votre âme. Dites-vous que c’est ce que vous voulez vraiment et que vous ferez tout pour y arriver ! Si vous êtes bien dans vos baskets et bien dans votre tête, vous réussirez.