Amateurs d’art ou curieux de belles créations, peut-être vous êtes vous déjà amusés dans un musée ou une galerie à découvrir une oeuvre qui change d’apparence et évolue en fonction du regard d’où on l’observe ? Non, ce mois-ci je ne vais pas vraiment vous parler de la fameuse légende selon laquelle la Joconde de Léonard de Vinci vous suivrait d’un regard mystérieux mais bien du mouvement artistique portant le nom d’art « cinétique » né dans les années 1960. C’est d’ailleurs à cette date là que l’expression apparait pour la première fois au musée de design de Zurich.
Casser le 4ème mur, par l’interaction
L’art cinétique, comme son nom l’indique, englobe toutes oeuvres incitant les personnes qui les observent à se mouvoir devant pour les comprendre et pour qu’elles s’expriment. Une oeuvre cinétique peut être produite de différentes manières ; en cassant le quatrième mur par l’interaction avec le spectateur mais également par le soleil, l’eau, le vent ou par un moteur, parfois avec des jeux de lumières néons (citons par exemple ici les « Schémas Lumineux Variables » de Grazia Varisco).
Allant de la sculpture avec Jean Tinguely, à la photographie lenticulaire avec Cécile Plaisance, jouant avec les couleurs et le Street Art avec Felipe Pantone ou se mêlant encore au Pop Art avec Patrick Rubinstein, l’art cinétique est effectivement un mouvement artistique englobant une grande variété de genres et de techniques qui se chevauchent. En effet, rappelons-le, l’art n’est pas hermétique et même si nous définissons certains styles, les artistes peuvent parfois avoirs plusieurs casquettes.
Dans le domaine de la sculpture, nous allons pouvoir reconnaître des prémices de l’art cinétique dès les années 1910 avec certaines oeuvres comme par exemple le Ready-Made « Roue de Bicyclette » de Marcel Duchamp. En 1930 Alexander Calder exposera aussi ses célèbres mobiles pour la première fois. Autour des années 1950, on voit également naître un autre mouvement, étroitement lié à l’art cinétique, il s’agit de « l’op art », fortement basé sur des jeux d’illusions d’optique.
Pour citer deux figures stars de ce mouvement, évoquons les travaux de la peintre Bridget Riley ainsi que ceux du très connu Victor Vasarely qui publiera à la même période, le « Manifeste jaune », théorisant l’art optique et cinétique avant que l’expression soit utilisée pour la première fois à Zurich. Enfin, l’op art se retrouve également aujourd’hui à travers la photographie kaléidoscopique avec par exemple les tableaux « Vizisym ».
Les expressions de l’art cinétique
Comme évoqué précédemment, l’art cinétique peut s’exprimer de différentes façons. Deux autres techniques très connues utilisées dans ce mouvement sont « l’effet moiré » (dont la superposition de lignes blanches et noires entrelacées donne l’impression au spectateur que l’oeuvre se déplace alors qu’elle est statique), ainsi que la technique de pliage en accordéon dont chaque face de lamelles pyramidales représente un morceau de l’image globale. De cette pratique citons par exemple Yaacov Agam et Patrick Rubinstein qui en sont de vrais experts.
L’art cinétique devient rapidement un mouvement très populaire et s’étend dans plusieurs pays. Les artistes se réunissent en plusieurs groupes pour travailler ensemble sur ces nouvelles expérimentations comme c’est le cas par exemple pour le « Gruppe T » à Milan qui questionne les variations des images dans une séquence temporelle.
Nous pouvons également évoquer le GRAV (Groupe de Recherches en Arts Visuels), créé en 1960 à Paris et qui publie en 1963 un manifeste sous forme de tracts distribués lors de la 3ème biennale de Paris. Intitulé « Assez de mystification » , ce manifeste exprimait la volonté du GRAV de réaliser un art accessible à tous par le simple fait de se déplacer ou d’interagir avec l’oeuvre. Ce collectif d’artistes était composé de grands noms tels que Julio Le Parc, François Morellet, Horacio Garcia Rossi , Francisco Sobrino, Joël Stein ou encore Yvaral.
L’art cinétique est un art agissant avec la nature, un regard, ayant besoin des autres pour être interactif, les artistes s’inspirent de ce qui les entourent et de ce qu’ils observent. Bien des siècles avant les années 1960, Léonard de Vinci, artiste avec un regard scientifique observant la nature, peignait la Joconde et réalisait des inventions en tenant toujours compte du mouvement et aujourd’hui encore plein d’artistes continuent d’être fascinés par ces fluctuations.
Enfants comme adultes nous aimons quand les choses sont animées ; l’oeuvre qui bouge nous intrigue, nous amuse, nous émerveille et nous procure une émotion ; c’est bien la preuve ici que ce vieil adage a raison : « Le mouvement, c’est la vie ! »
Et si vous êtes amateur d’art, découvrez sans attendre notre article Welcome to Pop Art !